(Reuters) - Les responsables de la Banque centrale européenne se sont inquiétés lors de leur réunion du 20 juillet d'une éventuelle hausse excessive de l'euro, ce qui annulerait les effets bénéfiques de leur politique accommodante, selon le compte-rendu du dernier Conseil des gouverneurs de la BCE publié jeudi.
Un récent rebond de l'euro, qui rend les exportations européennes moins attractives et les importations moins chères, est vu par les investisseurs comme étant la plus grande menace aux efforts de la BCE pour relancer l'inflation en zone euro.
Les minutes de la réunion de juillet reflètent la nervosité qui domine au sein de la BCE depuis que des remarques faites par son président, Mario Draghi, au mois de juin ont fait grimper l'euro et les rendements des obligations de la zone euro, annulant de fait une partie des efforts de la BCE pour diminuer les coûts d'emprunt et affaiblir la devise européenne.
Elles montrent que les responsables de la politique monétaire européenne sont très conscients de ces risques, d'où leur décision de ne pas modifier leur engagement à poursuivre leur politique monétaire de soutien à l'économie.
"Des inquiétudes ont été exprimées concernant une éventuelle réévaluation excessive par les marchés financiers, notamment sur les marchés des changes, dans l'avenir", a dit la banque. "Il a été souligné que le caractère toujours favorable des conditions de financement ne pouvait pas être considéré comme acquis."
Les membres du Conseil ont cependant noté que le raffermissement de l'euro reflétait avant tout l'amélioration de la conjoncture économique et la résistance accrue de la devise.
A 1,3%, l'inflation, tant publiée que sous-jacente, reste en net retrait par rapport à l'objectif de la BCE d'une inflation inférieure à mais proche de 2%, un casse tête pour ses responsables vu que le rythme de croissance, à 2,2% au deuxième trimestre, est à son plus haut niveau depuis début 2011.
L'économie des 19 membres de la zone euro affiche une croissance ininterrompue depuis 17 trimestres, ainsi qu'un taux de chômage en baisse plus forte que prévu.
Les investisseurs sont à l'affut d'indications sur les intentions de la BCE concernant son programme de rachats de 2.300 milliards d'euros d'actifs, qui doit être maintenu jusqu'en décembre et dont la plupart des intervenants de marchés attendent un démantèlement progressif l'an prochain.
Mais les responsables de la BCE ont dit que la durée et le rythme de ce programme n'étaient pas les seuls leviers d'ajustement à leur disposition pour ajuster leur politique.
Ils ont noté que les marchés étaient sensibles aux nouvelles annonces et ont rejeté l'idée d'ajuster la communication de pilotage des anticipations, qui inclue l'engagement à augmenter le plan de rachat d'actifs actuellement à 60 milliards d'euros par mois, en raison des craintes d'un contrecoup des marchés.
"Il a été généralement jugé essentiel à ce stade d'éviter d'envoyer des signaux susceptibles de déclencher une surinterprétation et pouvant s'avérer prématurés", a dit la BCE.
Les responsables ont pris acte de l'existence "de quelques premiers signes d'accélération" de l'inflation sous-jacente, hors énergie et alimentation, sans pour autant constater de "preuve concluante" d'une reprise soutenue de l'inflation.
L'euro a accru ses pertes face au dollar en réaction à ces annonces et a touché un plus bas de trois semaines, passant brièvement sous la barre de 1,17 dollar.
"En réalité, la BCE est plus inquiète que ne le pensait le marché", dit Simon Derrick, analyste de marché à Bank of New York Mellon. "Je pense qu'il est tout à fait possible que l'on assiste à une poursuite de la pression à la baisse sur l'euro."
Sur le front des obligations, les rendements de la dette, notamment espagnole et portugaise, ont légèrement baissé.