Le Comité de Coordination et de Surveillance des Risques Systémiques, composé des représentants de Bank Al-Maghrib, de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux, de l’Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale et de la Direction du Trésor et des Finances Extérieures, a tenu le jeudi 22 décembre 2022 sa seizième séance au siège de Bank Al-Maghrib (BAM) à Rabat.
La Comité a fait le point sur l’état d’avancement de la feuille de route inter-autorités de stabilité financière couvrant la période 2022-2024 et examiné le projet de circulaire conjointe des autorités de supervision du secteur financier relative aux conglomérats financiers.
Il a également analysé la cartographie des risques systémiques pesant sur le système financier national, dans un contexte encore entouré de fortes incertitudes. A ce titre, il a passé en revue les conclusions des réunions mensuelles de ses représentants tenues depuis l’avènement de la crise sanitaire ainsi que l'évolution des indicateurs de suivi. Ces derniers continuent de montrer une solidité et une résilience du secteur financier marocain.
A l’issue de l’examen de la situation du système financier au regard des tendances économiques et financières, observées et attendues, le Comité a relevé ce qui suit :
- L’évolution des conditions macroéconomiques ne fait pas ressortir jusqu’ici de risques majeurs pouvant menacer la stabilité financière, mais les vulnérabilités découlant de l’environnement externe et interne (répercussions de la guerre en Ukraine, sécheresse, séquelles de la pandémie, pressions inflationnistes…) appellent à la vigilance et continuent de faire l’objet d’une surveillance rapprochée. Selon les projections de Bank Al-Maghrib, la croissance de l’économie nationale devrait ralentir à 1,1% en 2022 avant de s’accélérer à 3% en 2023 et à 3,2% en 2024. Quant à l’inflation et après une forte accélération en 2022 à 6,6%, elle s’atténuerait tout en restant à un niveau élevé aux alentours de 4% en moyenne en 2023 et 2024. Concernant la position extérieure, le déficit du compte courant devrait s’atténuer pour avoisiner 2% au cours des deux prochaines années, tandis que les avoirs officiels de réserve se situeraient à 362,9 milliards en 2023 puis à 371 milliards en 2024, soit l’équivalent de près de 6 mois d’importations de biens et services. S’agissant des finances publiques, le déficit budgétaire s’allégerait graduellement passant de 5,3% du PIB en 2022 à 4,6% en 2023 et 4% en 2024. La dette du Trésor, quant à elle, s’atténuerait à 67,7% du PIB en 2023 et à 66,1% en 2024.
- En dépit d’un contexte difficile, le crédit bancaire destiné au secteur non financier devrait s’accélérer à 5,1% en 2022 tiré principalement par les facilités de trésorerie accordées aux entreprises privées. Il devrait revenir à 3,3% en 2023 avant de se redresser à 5,5% en 2024. Le taux des créances en souffrance s’est stabilisé à 8,7% pour un taux de provisionnement de 67% à fin octobre 2022.
- Le secteur bancaire a enregistré, au terme du 1er semestre 2022, une bonne tenue des résultats d’intermédiation et un repli du coût du risque. La hausse des taux d’intérêt a néanmoins impacté 2 les résultats sur activités de marché induisant une baisse de 7,5% du résultat cumulé des banques. Le secteur bancaire est solide avec des ratios moyens de solvabilité et de fonds propres de catégorie 1, se situant sur base individuelle à 15,3% et 11,8% respectivement pour des minimas réglementaires de 12% et 9%. Sur base consolidée, ces ratios s’établissent à 13,3% et 10,8%. Les banques disposent de coussins de liquidité supérieurs au minima réglementaire. L’exercice de macro stress test réalisé par Bank Al-Maghrib sur la base des projections économiques de décembre 2022 continue de montrer à cette date la résilience des banques face aux scénarii de chocs simulant une forte détérioration des conditions économiques.
- S’agissant des Infrastructures des Marchés Financiers, elles continuent de faire preuve d’une forte résilience aussi bien sur le plan financier que sur le plan opérationnel et présentent toujours un niveau de risque faible pour la stabilité financière.
- Pour sa part, le secteur des assurances a continué à afficher des fondamentaux solides et à démontrer sa résilience malgré la conjoncture internationale difficile marquée par de fortes incertitudes. Sur le plan technique, le secteur a maintenu au terme des trois premiers trimestres de cette année un bon rythme de croissance de l’ordre de 7,7% par rapport à la même période de l’année précédente, pour atteindre 42,4 milliards de dirhams. Cette évolution a été supportée aussi bien par la branche vie (+ 9,5%) que la branche non-vie (+6,1%). Sur le plan financier, les placements des entreprises d’assurances ont augmenté de 3% depuis le début de l’année pour s’établir à 216,7 milliards de dirhams à fin septembre. Toutefois, les plus-values latentes se sont repliées de 40,6% pour se situer à 19,3 milliards de dirhams, en raison notamment de la baisse du marché boursier et de la hausse des taux du marché secondaire. En matière de rentabilité, le résultat net a enregistré à fin juin une amélioration de l’ordre de 11,3% en glissement annuel. Concernant la solvabilité, le secteur continue de dégager une marge moyenne de plus de trois fois le minimum réglementaire requis.
- Concernant le secteur de la retraite, les principaux régimes de base connaissent une situation financière difficile marquée globalement par l’importance de leurs dettes implicites et par l’épuisement de leurs réserves à divers horizons. La réforme systémique de la retraite devrait permettre d’instaurer une tarification équilibrée, mais également de résorber, dans des proportions importantes, les engagements passés non couverts, et partant de rétablir les équilibres financiers dans le futur.
- A la Bourse de Casablanca, l’indice MASI enregistre au 9 décembre 2022 une baisse de 15,73% par rapport au début de l’année contre une hausse de 18,35% enregistrée en 2021. La volatilité moyenne ressort en repli à 9,4% contre 10,8% au premier semestre 2022. Dans ce contexte, la valorisation globale de la Bourse est en baisse sensible à 17,2x contre 19,8x en moyenne pour les 5 années d’avant crise Covid 19. Le volume d’émission sur le marché boursier à midécembre 2022 est quasiment stable en glissement annuel, avec un volume de 2,35 milliards de dirhams. Aussi, le ratio de liquidité du marché boursier à fin novembre ressort à 8,51%, en recul de 13,2% en glissement annuel.
- Au niveau du marché obligataire, les taux ont emprunté en 2022 une trajectoire haussière en particulier sur le marché secondaire. Cette hausse des taux s’est accompagnée d’une augmentation de la volatilité qui a atteint des niveaux élevés. L’encours de la dette privée à fin octobre 2022 s’élève à 254 milliards de dirhams, en hausse de 4,1% en glissement annuel. S’agissant des émetteurs non-financiers, leur endettement net à fin juin 2022 ressort à un niveau 3 globalement maitrisé et en baisse à 66% des capitaux propres contre 68% à la fin de l’année 2021 et 86% à la fin de l’année 2020.
- La gestion d’actifs a connu des évolutions contrastées au cours de l’année 2022. Le secteur des OPCVM a ainsi été impacté par la baisse du marché boursier et par les tensions haussières sur le marché des taux et a subi une décollecte au niveau des catégories d’OPCVM Obligations MLT, Obligations CT et Actions. L’actif net global des OPCVM ressort à 536,5 milliards de dirhams au 9 décembre 2022 en recul de 9,5% par rapport au début de l’année. Les autres compartiments de la gestion d’actifs réalisent des progressions en ligne avec celles observées les années précédentes, avec une stabilisation des actifs sous gestion pour les fonds de titrisation et des croissances à deux et trois chiffres pour les OPCC et les OPCI respectivement. L’actif net des OPCI a ainsi atteint 49 milliards de dirhams à fin octobre 2022, en augmentation de 127% depuis le début de l’année, avec une prépondérance des fonds réservés aux investisseurs qualifiés.
Le Comité a, par ailleurs, fait le point sur les travaux préparatoires de la visite sur place des évaluateurs du GAFI, sous la coordination de l’Autorité Nationale du Renseignement Financier. Il recommande de maintenir les efforts de toutes les parties prenantes pour la réussite de cette visite.